Le site de Parunis - le Mithraeum
C’est en 1986, à l’occasion de
la restructuration de l’ancien magasin Parunis, qu’une fouille
de sauvetage archéologique fut réalisée cours Victor
Hugo.
Un habitat privé suburbain d’époque flavienne.
Située en périphérie au sud de la
ville du Haut Empire, sur l’actuel cours Victor Hugo, la fouille
à mis à jour, dans un premier temps, les vestiges d’un
habitat à caractère privé, qui se développe
dans l’angle nord-est du terrain. Il est orienté sensiblement
nord-sud. Les vestiges fouillés représentent une faible
proportion de l’ensemble qui s’étendait sous le cours
Victor Hugo au nord, mais aussi à l’ouest, à l’emplacement
des caves construites à la fin du XVIIIe siècle et au XIXe
siècle.
Ils se composent à l’intérieur, d’une salle
principale et d’une pièce annexe et, à l’extérieur,
d’une cour, d’un puits et d’un petit corridor-galerie.
La salle principale, où seule l’assise du sol inférieur
est conservée, a livré, sous un mortier de tuileau de 8
à 10 cm d’épaisseur, un dispositif de pilettes en
terre-cuite appartenant à un hypocauste, selon un tracé
qui se distingue en creux dans le sol.
Les vestiges de cet habitat appartiennent à un bâtiment à
caractère privé qui pourrait être une domus de type
suburbain. La construction peut être placée dans le courant
du Ier siècle ap. J.-C., probablement dans la seconde moitié,
soit sous Néron, mais plus sûrement sous les Flaviens. L’hypocauste
est détruit au début du IIIe siècle. Les réoccupations
successives s’échelonnent entre le IIIe siècle et
le VIe siècle ap. J.-C. L’abandon définitif, marqué
par la récupération des matériaux (murs, charpentes,
briques…) est donc largement postérieur à la création
de l’enceinte de la ville.
Le Mithraeum
Le Mithraeum se trouvait au centre de l’emprise
de la fouille, sous le cloître du couvent des Grands Carmes, dont
les fondations ont provoqué de nombreuses perturbations.
La découverte de ce sanctuaire est exceptionnelle et ne doit en
fait sa sauvegarde qu’au principe même de sa construction.
Il s’agit d’un bâtiment enterré. La partie du
socle calcaire est décaissée sur une hauteur maximale de
2,60 m. La construction est orientée sensiblement nord-sud, suivant
l’axe déjà défini par l’habitat privé
pré-existant. Le bâtiment occupe une surface d’environ
200 m2. Il se présente comme une construction sub-rectangulaire,
flanquée d’une pièce annexe au sud.
Les murs sont en opus mixtum : parements de pierres de petit appareil
régularisés par des arases de briques, de part et d’autre
d’un blocage avec des chaînages d’angle en moyen appareil.
Sur le mur nord de la salle principale revêtu d’un enduit,
figuraient des vestiges de peinture à motifs géométriques
(bandes rouges et jaunes) ou symboliques (sortes de flammes dans l’axe
de la nef).
La salle principale mesure extérieurement 18,40
m de long sur 10,30 m de large excepté sur son côté
sud-ouest où le mur se présente en pan coupé.
Elle se divise en trois parties : une nef centrale, partie la plus large
(4 m) et deux banquettes latérales de largeurs irrégulières
(2,50 m à 2,90), surélevées en moyenne de 0,77 m
au-dessus du sol de la nef.
Aucun aménagement intérieur ne subsiste. Néanmoins,
les observations archéologiques permettent d’établir
certaines données.
Un escalier de dix marches (dont l’arrachement se voit nettement
sur l’enduit du mur) dans l’angle nord-ouest, permettait de
descendre dans cette salle. Une série de supports, de section carrée,
rythme les banquettes comme en témoignent les bases de deux d’entre
eux encore en place.
Trois aménagements particuliers sont à noter :
- Le centre de la banquette orientale est excavé jusqu’au
niveau du sol de la nef. Des rainures disposées à angle
droit, enduite de mortier, suggèrent l’existence d’une
structure légère aménagée au-dessus d’un
système de deux trous tronconiques.
Un petit podium est édifié au sud contre la banquette occidentale
et le mur de la pièce annexe. - Deux trous de poteaux sont pratiqués
en vis-à-vis sur les banquettes, au sud, à environ 1 m des
murs.
- Une porte étroite (0,80 m) désaxée par rapport
à la nef, ouvre au sud sur la pièce annexe.
La pièce annexe est de petites dimensions (extérieurement
4,70 x 3,30). Son sol est surélevé par rapport à
celui de la nef, mais à la même hauteur que celui des banquettes.
Dans un premier temps, cette pièce surélevée ne devait
être qu’un simple podium sur lequel était présenté
la statue mithriaque.
L’originalité du sanctuaire réside
dans ses dimensions qui le classent dans la catégorie des grands
Mithraea de Gaule romaine. Sa conception n’est pas originale mais
reprend des données caractéristiques :
- Le bâtiment est presque complètement enterré.
- Une division tripartite de l’espace est soulignée par la
présence de piliers sur les banquettes et reprise au niveau du
plafond.
- Il comprend une sorte de niche surélevée au fond de la
nef ; une disposition similaire existe dans de nombreux sanctuaires :
en Allemagne (Koenigshoffen, Wiesbaden, Trier), en Alsace (Biesheim),
en Italie (Ostie), en Grande-Bretagne (en forme d’hémicycle
à Londres).
- Dans ce sanctuaire, le culte de Mithra n’est associé à
celui d’aucune autre divinité. Le Mithraeum a été
conçu dès le départ comme tel, il ne s’intègre
pas dans une construction pre-existante, comme c’est parfois le
cas ailleurs.
Nous ne possédons aucun éléments
chronologique significatif pour dater la construction du bâtiment.
Cependant, un lot de monnaies, trouvé dans la pièce annexe
sous la plinthe, marquant le niveau du sol disparu, atteste une occupation
de la seconde moitié du IIIe siècle.
Après une première phase de destruction au cours de laquelle
les sols des banquettes sont arrachés, le Mithraeum est réoccupé
durant la première moitié du IVe siècle, pour être
détruit dans le courant de la seconde moitié de ce même
siècle.
Tous les matériaux périssables (bois) ou réutilisables
(briques, tuiles…) sont systématiquement récupérés
à l’exception du bas des murs et des statues. Toutefois,
l’absence de taurochtone conduit à supposer qu’il a
pu être dérobé, ou réduit à l’état
fragmentaire puis dispersé.
Ces indices confrontés à l’étude stylistique
des sculptures, permettent de supposer qu’il s’agit d’un
Mithraeum relativement précoce, construit au début du IIIe
siècle ap. J.-C., et démoli un siècle après.
La statuaire
Entièrement liée au culte de Mithra, elle
était disséminée à l’intérieur
du sanctuaire. Tous les éléments se trouvaient basculés
dans une même couche de destruction formée d’enduits
désagrégés.
Le léontocéphale a été découvert, brisé
en deux parties, avec tous les autels votifs dans la pièce annexe.
La représentation de la naissance de Mithra gisait dans la nef
centrale, au sud, au pied du petit podium aménagé contre
la banquette ouest et le mur de la pièce annexe.
Cautés et Cautopatès, les statues des deux porte-flambeaux,
ont été exhumés incomplets dans l’angle nord-ouest
de la nef principale.
La représentation rituelle et habituelle de Mithra terrassant le
taureau ne figure pas parmi les découvertes. |
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